jeudi 3 février 2005

LE LEVAIN DANS LA PÂTE

Serons-nous témoins de la fin d’une institution dont les origines remontent au début du christianisme ? L’Église qui s’est construite tout au long de ces deux derniers millénaires, qui est devenue un État avec ses pouvoirs d’autorité et ses représentations diplomatiques, qui a développé ses lois, ses dogmes, ses rites et ses liturgies, qui a consacré ses ministres et encadré ses fidèles, vit-elle ses derniers moments ? Est-ce le début de la fin des prophéties de Malachie ?

Il n’y a pas que la diminution des vocations sacerdotales et l’exode des pratiques religieuses qui portent à penser que l’Église-institution, telle que nous la connaissons, vit ses derniers moments. Il y a, me semble-t-il, au-delà de ces faits, une compréhension nouvelle de la foi. Cette compréhension nous ramène à l’essentiel du message de Jésus et nous rappelle que l’action de l’Esprit Saint n’est ni un monopole de quelques institutions que ce soit ni une figure de style. Ces deux forces que sont l’Évangile et l’Esprit Saint transcendent toutes les institutions existantes et permettent à toute personne de bonne volonté d’être présente à tous les niveaux de la société comme un levain dans la pâte. L’Évangile vient transformer le monde par le dedans et non pas juxtaposer deux mondes, un qui serait laïc et l’autre confessionnel, un naturel et l’autre spirituel. Le surnaturel de la Révélation de l’homme nouveau enveloppe tout autant le naturel et le spirituel. Nous appartenons tous à l’homme nouveau. Dans ce contexte, les débats reliés aux écoles laïques ou confessionnelles ne se posent plus. Les grandes questions portant sur la vie, le divorce, le célibat doivent être discutées en société et assumées par la société. Personne n’a le monopole de la vérité, mais tous disposent d’une conscience à laquelle ils ne peuvent échapper.

Les évènements de la semaine sainte sont des moments de vérité qui interpellent les autorités de nos institutions religieuses et civiles, qui nous questionnent sur la foi que nous portons ou pratiquons. Nous ne pouvons oublier que ce sont les pouvoirs religieux et politiques en place, Caïphe, Pilate et Hérode, avec le support d’une foule manipulée en ce sens, qui ont décidé du sort de Jésus. Après deux mille ans la situation des rapports de force entre les grandes valeurs humaines et les pouvoirs en place n’ont pas changé tant que ça… Ces évènements devraient nous ouvrir davantage à la différence en nous rendant plus humbles dans nos jugements, plus ouverts dans nos services et plus responsables dans nos prises de positions.

Si beaucoup de personnes rejettent l’Église et ses institutions, peu par contre rejettent Jésus et le message dont sa vie témoigne. Nombreux sont ceux et celles, à l’intérieur comme à l’extérieur des institutions religieuses, qui travaillent pour qu’il y ait plus de vérité et de respect entre les personnes, plus de justice entre les différents groupes sociaux, une paix plus durable pour tous. Ils sont, dans leurs milieux respectifs, des témoins de vérité et de vie. Ils rappellent le fait que le don de la foi et celui de l’Esprit sont accessibles à toute personne de bonne volonté.

Oscar Fortin, théologien

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