samedi 3 janvier 2009

CUBA: 50 ANS DE LUTTE ET DE DÉVELOPPEMENT

Il y a 50 ans « Papa Doc Duvalier » régnait sur Haïti comme Batista sur Cuba. Deux îles voisines dont les peuples vivaient la dépendance, la pauvreté, l’analphabétisme, les maladies qui frappaient, souvent mortellement, ceux et celles qui en étaient atteints. Ils étaient tous les deux dans les bonnes grâces du puissant voisin du nord, les États-Unis. « Papa Doc » était leur homme tout comme Batista. Cette grande démocratie ne se faisait pas de scrupule avec ces dictateurs, pas plus d’ailleurs qu’avec la corruption et la répression qui caractérisaient leurs administrations. Les missionnaires apportaient les dons de Dieu et une aide humanitaire, donnant ainsi bonne conscience, alors que leurs peuples livraient, à la sueur de leur front et pour une bouchée de pain, les richesses de leurs terres. Les pays développés auxquels nous appartenons faisaient appels à la générosité pour l’aide humanitaire et se gardaient bien de dénoncer les prédateurs qui se nourrissaient de cette pauvreté.

Le premier janvier 1959, des jeunes, avec à leur tête un certain Fidel, révoltés devant autant d’injustice et de misère, soutenus par tout un peuple, renversent, après une lutte qui aura duré plus de 6 ans, le régime corrompu de Batista. Ça se passait à Cuba (11.4 millions h). Ces jeunes n’étaient pas à la recherche d’une fortune personnelle, d’un pouvoir de domination. Ils étaient dominés par la pensée que la justice est un droit fondamental pour tous et toutes, que le respect et l’indépendance ne sont pas réservés qu’aux privilégiés et aux puissants, que les biens de la terre doivent prioritairement servir les besoins les plus essentiels des personnes : l’alimentation, l’éducation, la santé, l’habitation, un travail décent. Plusieurs y auront laissé leur vie alors que d’autres l’auront quotidiennement risquée. Cet idéal était devenu celui de tout un peuple.

Les premiers mots de Fidel, à son arrivée à la Havane en ce 6 janvier 1959, ont été pour reconnaître le courage et le civisme du peuple cubain qui a rendu possible cette grande victoire.

« Notre bataillon le plus solide, notre meilleure troupe, l’unique troupe qui est capable de gagner seule la guerre, cette troupe c’est le peuple. Un général ne peut rien contre un peuple, une armée ne peut rien contre un peuple. Parce que le peuple est invincible et c’est le peuple qui gagna cette guerre.

Le peuple, le peuple gagna la guerre, cette guerre que personne d’autre que le peuple ne pouvait gagner. Je le dis et le redis au cas où quelqu’un penserait que c’est lui qui la gagna ou qu’une troupe penserait que c’est elle qui la gagna. C’est d’abord et avant tout le peuple qui est vainqueur de cette guerre.

Je suis orgueilleux de la discipline du peuple et de l’esprit du peuple, parce que s’il a fait quelque chose de vraiment excellent c’est de démontrer sa dignité et son civisme. Ça vaut la peine de se sacrifier pour un tel peuple. Jamais nous ne trahirons notre peuple. »

C’est ce même leader, 50 ans plus tard, qui, de son lieu de convalescence où l’a confiné la maladie, prend de nouveau la plume pour reconnaître une fois de plus le courage et la force d’un peuple qui a rendu possible le parcours des 50 années de révolution parsemées d’innombrables embuches. Celui qui a repris à son compte cette parole de Marti « que toute la gloire du monde peut être contenue dans un grain de sénevé » s’est fait discret pour laisser toute la place à ce peuple avec qui il a lié son destin.

Les ennemis d’un tel changement n’ont rien ménagé pour faire de cette révolution la démonstration d’un échec démobilisateur pour tous les autres peuples. Il y a eu ces centaines de tentatives d’assassinat de Fidel, l’invasion criminelle de la Baie des cochons, le blocus économique rendant son développement encore plus difficile, les mille et une difficultés mises en place pour rendre l’émigration des cubains et cubaines plus sécuritaires, les centaines de millions de dollars pour transformer en criminels ces héros d’une révolution qui ont fait basculer tout un peuple de la dépendance à l’indépendance, de l’analphabétisme à l’éducation pour tous et toutes, de l’individualisme à la solidarité. Cinq de ces héros sont toujours détenus injustement dans les prisons étasuniennes. En dépit de la désinformation dont les médias de l’empire a le secret, le monde sait les conquêtes réalisées par ce peuple dans les secteurs de la santé, ceux de l’éducation, ses contributions dans ces mêmes secteurs dans les nombreux pays de l’Amérique latine et des caraïbes. Son organisation sociale lui permet d’affronter, sans perte de vie, les ouragans qui sèment la mort et la destruction dans les pays voisins, y compris aux États-Unis. Il a développé un sens de la solidarité qui revêt les mêmes impératifs que les impôts que nous payons dans nos pays, à l’exception près que tous et toutes y participent avec ce sens de la responsabilité partagée et celui du Bien commun. Il n’y a pas d’exception.

Cet exemple du peuple cubain et de certains de ses leaders charismatiques comme Che Guevara, Fidel Castro ont inspiré de nombreux autres peuples et trouvé auprès de grands intellectuels et Prix Nobel de la paix encouragements et supports. Aujourd’hui, la Bolivie (9.3 millions h.) avec Évo Morales, le Venezuela (26.4 millions h.) avec Hugo Chavez, l’Équateur (13.5 millions) avec Rafael Correa, le Brésil (178 millions h.) avec Lula, le Nicaragua (5.7 millions h.) avec Daniel Ortega, tous élus démocratiquement avec de fortes majorités, trouvent conseil auprès de Fidel et inspiration auprès du peuple cubain. Rigoberta Menchu Tum (1992) ainsi que Adolfo Pérez Esquivel 1980), tous deux prix Nobel de la Paix, apportent leur soutien indéfectible à la révolution cubaine et à celle des autres peuples qui s’en inspirent. Gabriel Garcia Marquez, prix Nobel de littérature (1982) est toujours un ami très proche de Fidel tout comme le poète et écrivain Ernesto Cardenal qui y a trouvé son inspiration socialiste.

Pendant ce temps, le peuple de « Papa Doc », Haïti (9.8 millions h.), toujours sous bonne garde de l’Empire, continue dans la pauvreté, la dépendance, la misère, l’analphabétisme et l’absence d’infrastructure et de service de santé pour tous et toutes. Les organismes humanitaires continuent à être sollicités pour répondre aux urgences toujours aussi présentes. Il y a les ouragans annuels qui viennent y semer la mort par centaines et des dégâts matériels qui les laissent souvent dans la boue. Le Président qu’il s’était donné en la personne de Jean Bertrand Aristide a vite été discrédité et mis à la porte par ceux-là même qui ne voulaient pas, dans cette région du monde, d’un autre peuple indépendant, maître de son destin et de ses richesses.

Pendant que la crise économique et financière mondiale met à l’épreuve le système « sacré » du capitalisme, les maisons d’édition n’arrivent plus à répondre à la demande des ouvrages de Karl Marx dont les analyses prédisent, depuis plus de 100 ans, son effondrement. L’individualisme et l’égoïsme qui prennent racines profondes dans tout homme doivent être contenus par des interventions d’États responsables du bien commun et disposant des pouvoirs pour en limiter les effets pervers. En bout de ligne, ce sera toujours la présence de peuples vigilants et mobilisés qui assurera l’intégrité des acteurs à chacun de leurs niveaux.

Ceux et celles qui ont chanté la fin du socialisme peuvent retourner faire leur devoir. Ce qui se passe dans plusieurs pays de l’Amérique latine se répandra dans plusieurs autres régions du monde non pas comme un cancer mais comme l’alternative au capitalisme qui ne peut-être que le reflet de l’individualisme et de l’égoïsme de ceux et celles qui s’en nourrissent. L’ère de la solidarité humaine devient le passage incontournable pour tous ceux et celles qui voudront accéder à un monde nouveau.

Toute mon admiration au peuple cubain et à ses leaders qui on su avancer avec lui sur les voies étroites des obstacles et des défis à relever.

Oscar Fortin, théologien et politologue
Québec, le 3 janvier 2009

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