mardi 14 janvier 2014

LE VATICAN ANTICHAMBRE DE WASHINGTON








.L’arrivée du pape François, avec sa façon d’être et de parler, a suscité de grands espoirs chez un grand nombre de chrétiens, mais aussi chez de nombreux non-croyants qui voient l’Église comme une puissance, alliée indéfectible de Washington. Les deux derniers papes, entre autres, ne s’en cachèrent pas, Jean-Paul II, avec sa médaille de la Liberté et Benoît XVI avec cette splendide célébration de son anniversaire dans les jardins de la Maison-Blanche.

On ne se cachera pas que cette alliance non écrite, mais indéfectible, conditionne toutes les nominations ayant un caractère d’autorité dans la gestion des relations de l’Église avec les divers gouvernements et organisations à travers le monde. Pas surprenant qu’en Amérique latine, les nonces apostoliques, les évêques et les cardinaux soient, dans leur ensemble, alignés avec les politiques de Washington. Ils sont avec la démocratie qui plaît à Washington et avec les dictateurs qui se soumettent à Washington.

Le problème d’une telle alliance est qu’elle va à l’encontre de la « catholicité » de l’Église. Que peuvent penser les ennemis de Washington de cette Église qui est partie prenante des projets de ce dernier? Par exemple les Irakiens, les Libyens, les Palestiniens, les Indiens, les Chinois, les Russes, etc. L’Église n’est plus l’Église universelle, mais l’Église de Washington. Aucun pays d’Amérique latine n’échappe à cette Alliance et les peuples qui osent se lever et s’affranchir de l’oncle Sam trouveront sur leur chemin un épiscopat majoritairement au service de l’oncle Sam.

C’est triste à dire, mais c’est comme ça. Cette Église dont le pape François souhaite voir avec les pauvres se retrouve, par ses dirigeants et l’État du Vatican, en meilleure compagnie avec Washington. C’est pourtant ce même pape François qui tout en condamnant le capitalisme sauvage dont Washington est le grand maître, nomme à des postes clefs de la gouvernance de l’Église ceux qui sauront entretenir ce concubinage. Le cas du nouveau secrétaire d’État, Pietro Parolin en est un exemple. Il en va de même avec la nomination du cardinal MARADIAGA comme responsable de sa commission pour la réforme de la Curie. Ce dernier est de mèche avec les oligarchies au Honduras et a été un acteur habilement utilisé dans le coup d’État militaire de juin 2009 et dans la toute récente campagne électorale à la Présidence au Honduras où Xiamora Zelaya Castro, candidate pour le parti LIBRE, perdit la présidence, entre autres, par des fraudes techniques.

Aujourd’hui même, 14 janvier, le Secrétaire d’État du Vatican reçoit le Secrétaire d’État des États-Unis. S’il ne s’agissait que de rencontres entre deux représentants d’État pour traiter de questions communes à leurs relations ou même d’échangeur sur le panorama mondial, il n’y aurait rien à y redire. Mais là, il s’agit d’établir une stratégie commune pour la rencontre de paix à Genève 2 entre le Vatican, en soi neutre, et Washington, l’un des principaux intervenants dans ce conflit. Ce que fait le Vatican avec Washington et qu’il n’a pas fait avec Moscou et la Syrie, c’est de prendre parti avec et pour Washington.

L’arrivée de John Kerry, le catholique pratiquant, dit une note, a été bien préparée. On lui a déroulé un véritable tapis rouge avec ce rapport d’un comité spécial, réuni sous l’égide de l’Académie pontificale des sciences auquel participèrent, entres autres, Tony Blair, cet ex-premier ministre d’Angleterre, spécialiste des interventions en pays étrangers, également, en représentation de l’Espagne, un autre pays spécialisé dans les interventions étrangères, l’ex-ministre des Relations extérieures, Miguel Angel Moratinos et certains autres invités de mêmes orientations. Il eut été normal, s’agissant d’une consultation demandée par le Vatican, qu’il y ait des représentants des milieux intellectuels syriens et russes. Ce ne fut pas fait. La liste des invités, sans doute, préparée par Washington n’en a pas tenu compte.

Le jour même de l’arrivée de John Kerry au Vatican, comme par un heureux hasard, sont publiées les recommandations de ce comité qui ne font aucune distinction entre les responsabilités d’un gouvernement légitime et soutenu par la majorité de son peuple et ses opposants, armés à l’instigation de pays étrangers, comme les États-Unis, la France et leurs alliés du Moyen-Orient. Les titres qu’on y lit sont éloquents : « LE VATICAN DEMANDE À LA SYRIE UN CESSEZ DE FEU SANS CONDITION » « Kerry et Parolin s’accorde sur une stratégie commune pour la paix. » Voilà, le tour est joué, c’est maintenant le Vatican qui porte le flambeau du désarmement sans condition de la Syrie.

Comment se fait-il que l’Église catholique n’ait pas fait cette réunion avec les autorités syriennes qui se manifestèrent récemment à travers une Lette du président Al Assad adressé au pape? Ç’eut été une bonne occasion pour développer une stratégie commune pour la paix? »  La réponse est bien simple. Le Vatican travaille main dans la main avec Washington sous le regard d’un pape qui veut sortir son Église de l’asphyxie dans laquelle elle est enfermée tout en faisant, à peu près tout, pour qu’elle demeure ce qu’elle est. Ses nominations y sont pour beaucoup. Rien de neuf sous le soleil. Ses discours sont impressionnants, ses gestes inspirants, mais ses décisions demeurent bien en deçà de qu’on est en droit d’en attendre.

Il faut, me semble-t-il, mettre un terme à ce concubinage qui déshonore l’Église et ceux qui s’y rattachent. À ce titre, un grand ménage s’impose au Vatican au niveau des postes d’autorité. Soit que l’Église fasse table rase de l’État du Vatican ou qu’elle y mette des personnes qui la représentent dans sa catholicité et dans ses solidarités avec les pauvres. Le pape François ne peut pas jouer sur les deux claviers à la fois. Il y a toujours d’une part les volontés de Dieu et d’autre part les intérêts de Mammon. Ce sont deux antagonistes.

Il est urgent pour la catholicité que le Vatican cesse d’être l’antichambre de Washington.

Avec tout mon respect, mais aussi, avec mes convictions les plus profondes.
Oscar Fortin
Québec, le 14 janvier 2014




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